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Respire ! la vie ne tient qu'à un souffle...




Tout avait commencé par un banal mal de gorge.


Samedi soir, seule à dîner, plateau télé.

Quelques restes de poisson froid cuisinés.

Tout d’un coup ! une brûlure aigüe et intense dans la bouche !

Incapacité à déglutir !

A deux doigts de m’étouffer !


Je file dans la salle de bain.

Vision d’horreur : visage bouffi jusque dans la bouche.

Oedème du visage et de la gorge !


Lucidité extrême.

Je suis en train de faire un oedème de Quincke.

Je n’ai pourtant aucune allergie connue mais je sais, depuis toute petite, qu’on peut en mourir.


Tout s’accélère en même temps que tout se ralentit. Je prends conscience de l’urgence VITALE de la situation tout comme je sens, en un quart de seconde, que je peux basculer dans un mode-panique. Que je peux perdre tout contrôle, que tout peut s’emballer.


Ne surtout pas laisser ma peur me prendre en otage. Ne-pas-lai-sser-l’angoisse-m’étreindre.


Surtout, garde les idées claires.

RES-PI-RE,

TOUT-VA-BIEN-SE-PASSER.

Retourne dans le salon te poser. 


Une petite voix intérieure de sagesse est en train de prendre le relais, malgré moi.

Tel un automate, sans me poser de questions, je retourne m’asseoir dans le salon. Je m’installe sur le canapé, dos droit, les pieds bien ancrés dans le sol, mains déposées sur les jambes.

Ferme les yeux et respire profondément. Surtout expire le plus lentement possible, plusieurs fois, pour ne pas laisser ton coeur s’emballer.


Respire.

Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir.


Continue. Ton coeur reste calme.


Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir.


Bien. Continue.


Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir. Inspir, expir.


Maintenant, appelle le 15.


J’ai beaucoup de mal à parler. Ma langue a doublé de volume et je n’arrive pas à déglutir.

Parle lentement, posément. 


« Avez-vous de la cortisone chez vous ?

- Non.

- Êtes-vous seule ?

- Oui.

- Descendez chez un voisin. On vous envoie une équipe. »


Les secours sont là. Je comprends bien l’urgence et en même temps je suis profondément calme. Je me sens en sécurité. Je me laisse porter.


On m’administre une dose de cheval de cortisone et d’anti-histaminique.


Quatre heures en observation aux urgences. Remarquable prise en charge.

L’alerte rouge est terminée. Pour l’instant.

Retour au calme.


Temps de décantation.

Prise de conscience aigüe que nous ne sommes pas grand chose. Que la vie peut basculer à tout moment. Qu’elle ne tient véritablement qu’à un fil d’or, ténu, précieux, dont il faut prendre soin.


« Fais du bien à ton corps pour que ton âme ait envie d’y rester ». Proverbe indien


Prise de conscience réconfortante, aussi, de notre capacité à agir sur notre corps, par une attention renouvelée, à chaque instant, à la respiration.


De ce lien précieux qui s’est établi, tout au long de ces années de pratique du yoga et de la méditation, entre le corps, les émotions et la respiration.


De cette auto-régulation qui se met en place spontanément et qui m’a certainement sauvé la vie, ce samedi soir, seule à dîner, avec mon plateau-télé.


La vie ne tient qu’à un souffle. Respire...


Isabelle Thévenet, Paris, Novembre 2018

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